Dans ce dialogue entre Hélène Serre et Grégoire Vitry, l’approche systémique du burn-out est explorée à travers des exemples concrets. Ils montrent comment sortir de l’épuisement en apprenant à dire non, à écouter son corps et à transformer les schémas relationnels contre-productifs.
Guide formation


Introduction
Le burn-out est souvent perçu comme un épuisement professionnel que l’on traite par le repos, les arrêts de travail, ou encore la médication. Mais dans ce dialogue entre Hélène Serre, médecin spécialiste en approche systémique, et Grégoire Vitry, docteur-chercheur en psychologie, systémicien et directeur de l’école de formation LACT, cette notion est déconstruite pour en montrer la complexité. L’approche systémique révèle qu’il ne s’agit pas seulement d’un problème de surcharge de travail, mais d’un ensemble d’interactions entre l’individu, son histoire, son environnement et sa manière de faire face à la pression. Cette conversation met en lumière le rôle actif du patient dans l’aggravation de sa situation et ouvre la voie à des interventions thérapeutiques ciblées et puissantes.
Le mythe d’un burn-out exclusivement causé par l’entreprise
Dès l’ouverture du dialogue, Grégoire Vitry insiste sur l’idée que le burn-out ne se réduit pas à un excès de travail imposé par l’entreprise. Bien sûr, il peut y avoir des restructurations, du stress, une charge importante. Mais il arrive aussi que la personne soit, par sa propre histoire ou son fonctionnement personnel, particulièrement vulnérable. Il s’agit souvent de personnalités perfectionnistes, qui ont grandi avec l’idée qu’il ne faut pas montrer ses failles, qu’il faut toujours être à la hauteur.
Ce perfectionnisme pousse à vouloir tout contrôler, à éviter de montrer le moindre défaut. Ce mode de fonctionnement, combiné à un environnement exigeant, forme une boucle de renforcement qui mène à l’épuisement. Le burn-out devient alors le résultat d’une interaction systémique : ce n’est ni uniquement l’entreprise, ni uniquement la personne, mais l’ensemble du système qui produit cette crise.
Thomas, un cas concret de burn-out
Pour illustrer cette dynamique, Grégoire Vitry et Hélène Serre évoquent le cas de Thomas, un professionnel de la culture, passionné par son métier, mais pris dans une spirale infernale. Il travaille dans une petite structure confrontée à de grands groupes, avec une charge de travail énorme, à laquelle il ajoute des activités extra-professionnelles pour "profiter de la vie". Jusqu’au jour où il s’écroule.
Mis en arrêt maladie par son médecin, Thomas met un mois à sortir de son lit. Il répète sans cesse qu’il n’est pas à la hauteur, qu’il a échoué. Son discours est marqué par la culpabilité, une forme de syndrome de l’imposteur. Il se retrouve enfermé dans une "prostitution relationnelle", où il dit oui à tout pour être aimé, mais finit par se trahir lui-même.
Le piège du oui : quand dire oui revient à dire non à soi-même
Cette dynamique du « oui systématique » est au cœur de nombreuses situations de burn-out. À force de vouloir satisfaire tout le monde, de répondre aux attentes, le sujet se suradapte. Grégoire Vitry parle d’un « soldat idéal » qui, à force d’obéissance et de politesse, finit par s’effondrer. Il entre dans une spirale où plus il dit oui, plus il se perd.
Dans le cas de Thomas, cela se manifeste par l’accumulation de tâches, le refus d’écouter ses émotions, la mise à distance de la peur. Mais le corps, à un moment donné, dit stop. La chute est brutale.

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La technique du « comment aggraver » : une stratégie paradoxale
Face à ce type de configuration, l’approche systémique stratégique ne cherche pas à raisonner le patient, mais à l’amener à expérimenter par lui-même les conséquences de ses actes. Une technique centrale est celle du « comment aggraver ».
On demande au patient : « Si vous deviez volontairement aggraver votre situation, que feriez-vous ? ». Dans le cas de Thomas, il répondrait qu’il prendrait encore plus de dossiers, négligerait encore plus sa compagne, se surchargerait encore plus. En disant cela, il réalise que c’est déjà ce qu’il fait. Et que c’est précisément ce qui le détruit.
Cette prise de conscience ne vient pas d’une injonction extérieure, mais d’une mise en scène du processus. Elle crée un effet miroir qui permet au patient de redevenir acteur, non plus de son autodestruction, mais de sa reconstruction.
Expérimenter le « non » : un apprentissage progressif
Dire non n’est pas simple, surtout pour quelqu’un qui a été élevé dans une culture de l’obéissance. Il ne s’agit pas de dire non à son patron du jour au lendemain, mais de commencer par des micro-expériences. Par exemple, oser dire à la boulangère que la baguette est trop cuite. Cela peut sembler anodin, mais pour quelqu’un comme Thomas, c’est une révolution.
Ces petits « non » permettent de reprogrammer le système. Ils montrent que dire non ne provoque pas nécessairement un rejet ou un effondrement du lien. C’est une manière d’apprendre à se protéger, à poser des limites, à se respecter.
Le corps comme ressource : écouter les signaux faibles
Un autre levier essentiel dans l’approche systémique est de réintégrer le corps comme ressource. Dans le cas de Thomas, le corps a parlé avant lui. Il s’est effondré. Le travail thérapeutique consiste à identifier ces signaux faibles – fatigue, irritabilité, insomnie – comme des indicateurs précieux.
Grégoire Vitry utilise une métaphore : la personne est comme un conducteur qui roule les yeux bandés sur une route verglacée. À un moment donné, il faut ouvrir les yeux. Ce travail de reconnexion au corps est indispensable pour prévenir les rechutes.
La convalescence : temps de transformation
La guérison ne consiste pas à revenir à l’état antérieur, mais à construire un « comme après ». C’est une période de convalescence, comparable à celle d’une fracture : on ne repart pas courir juste après avoir quitté le plâtre. Il faut du temps pour rééduquer, pour reconstruire.
C’est aussi un moment où de nouvelles ressources émergent : attention au sommeil, aux émotions, à l’alimentation, à ses besoins. La personne ne devient pas « plus forte », mais « mieux forte » – plus en lien avec elle-même, plus sereine.
L’émotion apprivoisée : apprendre à vivre avec la peur
Thomas a mis à distance ses émotions, notamment la peur. Dans la culture où il a grandi, il ne fallait pas avoir peur, il fallait être fort. Or, cette mise à distance a été un facteur aggravant. Le travail systémique invite à apprivoiser ses émotions, à les expérimenter avec le corps, comme un paratonnerre.
Cette régulation émotionnelle devient plus fonctionnelle. Ce n’est qu’en se rapprochant de la peur, en la nommant, qu’il devient possible de la traverser.
Les lettres de colère : une technique de libération émotionnelle
Un autre outil proposé est celui des lettres de colère. Thomas éprouve de la colère contre lui-même, contre ses employeurs. L’écriture devient un moyen de déposer, de mettre à distance, de transformer cette énergie brute en quelque chose de constructif.
Résultats de l’approche systémique : moins de six mois, moins de six séances
Grégoire Vitry conclut en mentionnant les recherches menées dans le cadre du programme SYPRENE. Les résultats montrent que dans 90 % des cas, les personnes en burn-out vont mieux en moins de six mois et moins de six séances. Il ne s’agit pas d’une recette miracle, mais d’une approche ciblée, pragmatique, qui aide la personne à sortir de la boucle dans laquelle elle s’est enfermée.
Conclusion : Reprendre le pouvoir sur soi
Ce dialogue met en lumière la complexité du burn-out et l’efficacité de l’approche systémique pour en sortir. Le burn-out n’est pas une fatalité. C’est un système à transformer, une dynamique à inverser, un appel du corps et de l’âme à redevenir soi-même. Loin de se résumer à un arrêt de travail ou à une médication, la guérison passe par un apprentissage : dire non, écouter son corps, apprivoiser ses émotions, reconstruire un sens.
Comme le rappelle Grégoire Vitry : « Il ne s’agit pas de redevenir comme avant, mais de construire un comme après. »
Où se former à l’approche systémique et stratégique?
LACT propose plusieurs parcours de formation web certifiantes en direct avec 50 formateurs internationaux
- Formation systémique généraliste
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